1918. Albert Roche, un chasseur alpin du 27e BCA d'Annecy, était décoré par le Maréchal Foch, du titre de "premier soldat de France". Ses faits d'armes témoignent de son incroyable obstination, de son courage extrême et de son sens inné de la ruse, lorsqu'il affrontait les allemands, lors de la guerre de 14/18. Une guerre qu'il n'aurait jamais dû faire, parce qu'il était trop jeune, mais c'est mal connaître le bonhomme, qui a dû se faire porter déserteur, pour se retrouver au front, dans les tranchées, pour le meilleur et pour le pire. Il aura finalement survécu à 9 blessures, avec le courage de s'extraire lui-même une balle ennemie. Ce petit gringalet a libéré une cinquantaine de ses camarades, il a également sauvé la vie d' un de ses capitaines, qui le sauvera à son tour du peloton d'exécution, in extrémis. Ce héros oublié des livres d'histoire a fait à lui seul 1180 prisonniers allemands ...

Direction la Première Guerre mondiale avec Albert Roche. Pas besoin d'aller chercher du côté des États-Unis, on l'a ici notre "Captain America" français. Côté scénario, le récit se lit facilement. Julien Hervieux, fidèle à son style, met en lumière, étape par étape, les exploits de ce héros. Il souligne la détermination de Roche à servir la France malgré l'horreur des tranchées, les conditions de guerre rudes et l'esprit de sacrifice qui l'animait. Côté dessin, l’aspect visuel épouse parfaitement le ton sombre de cette période. Les illustrations oscillent entre des tons doux et clairs pour sa vie d'avant-guerre, et une atmosphère sombre, presque brutale, pour les scènes de conflit, où les détails sanglants montrent l'intensité des combats. De magnifiques dessins hyperréalistes, des couleurs appuyées et immersives caractérisent cette monographie guerrière, sorte d’hagiographie du poilu. Les yeux écarquillés des protagonistes transmettent toute l’horreur de cette guerre de 14-18. Ils traduisent successivement l’étonnement, le cynisme, l’horreur et très communément la peur. Ces regards pénètrent profondément le lecteur comme pour interpeler sa conscience. Les visages sont burinés et marqués. Le chaos et la désolation soulignent la période. Le sang est partout : le rouge tranche avec les couleurs ternes propres à l’environnement disloqué. Le patriotisme, la fidélité, la camaraderie sont à l’honneur. L’obscur provincial, Albert Roche, devenu chasseur alpin, sera au centre, le temps d’une boucherie, d’une allégorie guerrière de l’immédiat après-guerre avant de retourner dans un certain anonymat. Une bien plaisante lecture. En conclusion, Albert Roche est une nouvelle réussite de Julien Hervieux.