Scénario : Zidrou
Dessin : Maltaite
Résumé : Blandine Lefranc a des airs de Natacha : la silhouette d'une jolie hôtesse de l'air qui serait venue s'échouer comme strip-teaseuse dans un bar louche des States. Un client arrive. Mais alors que la belle s'effeuille et se déhanche sur l'air de The Stripper, elle sait à l'instant même qu'il est arrivé quelque chose de grave à sa sœur jumelle Aline, restée en France. Les deux sœurs ne se voient pourtant plus. Aline est celle qui a réussi, la préférée de ses parents, une harpiste à succès. Elle a disparu. En route dans la voiture avec son époux, l'instant d'après elle n'y était plus. Reste le mari, évidemment, que tout accuse. Bientôt, comme par enchantement, les disparitions se multiplient et entrainent le polar dans une dimension fantastique. "S'il y a bien une chose que les gens refusent de croire en face, c'est l'irréalité", lance un personnage en guise d'avertissement.
Sous couvert d’une histoire policière, Zidrou se lance dans un polar fantastique mettant en perspective la dualité graalesque de l'artiste : reconnaissance et pérennité. *Il métaphorise le métier d’auteur de BD avec ses doutes, son manque de reconnaissance, sa solitude dans une atmosphère années 1960 à la Gil Jourdan avec des couleurs typiques des albums de cette période. L’héroïne possède des faux-airs d’une Isabelle adulte, série qui relate les aventures d’une enfant ballotée entre un monde féérique et notre réalité (tiens donc ?), créée par Will, le père de l’excellent Eric Maltaite. Elle se nomme Lefranc comme la série éponyme aux multiples changements (scénaristes, dessinateurs) depuis 1954. Danseuse de strip-tease (activité sociale peu présentable) elle incarne la BD quand sa jumelle disparue, musicienne classique, représente l’Art. La musique jouée est celle d’une oubliée de l’Histoire, Germaine Tailleferre, artiste prolifique en son temps proche du gratin du Montparnasse des années 1920-1930. La couverture de l’album inspirée de Roy Lichtenstein donne aussi le ton. Une de ses onomatopées orne d’ailleurs l’appartement de la musicienne. Lichtenstein artiste reconnu, adulé qui ne fait que "s’inspirer" des comics et des dessins animés, genres ignorés voire méprisés à l’époque. Les noms des personnages tertiaires évoquent des œuvres et des personnes du monde de la BD. Philippe Ballester entre en résonance avec le dessinateur Julio Ballester. Une jeune disparue répond au nom de Van Tricht, comme une éditrice. Un pilote clone physiquement Martin Milan, série éponyme de Christian Godard. Pierre Tchernia, ami et associé de Goscinny et d’Uderzo, intervient dans un rôle-clé. Etc. Tous ces éléments éminemment capillotractés vont dans le sens d’une relation compliquée entre art et BD (en mode "je t’aime, moi non, plus") à laquelle Zidrou apporte pourtant une réponse fantastico-métaphysique apaisée quoique frustrante.
VERDICT
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Dans cet album, nous rencontrons Blandine Lefranc qui travaille comme strip-teaseuse dans un bar ombragé aux États-Unis. Lorsqu'un client arrive, elle commence à faire son travail, mais elle sent tout à coup que quelque chose de mal est arrivé à sa sœur jumelle Aline qui est restée en France. Un thriller divertissant et bien troussé.