Scénario : Irene Marchesini
Dessin : Carlotta Dicataldo
Dans un village médiéval, deux sorcières sont brûlées sur le bûcher. Au même moment, un enfant albinos, Martino, naît. Le garçon grandit dans la petite communauté où il est mal vu et considéré comme porteur de malchance par ses concitoyens et certains membres de sa famille. Un jour, son père décide de le renvoyer de la maison. Martino s'enfuit et se réfugie dans les bois. C'est là que vit une femme, Viviana, considérée comme une sorcière, mais qui l'accueille à bras ouverts et l'aidera à s'engager sur la voie de l'acceptation.
On a toujours besoin d'histoires qui parlent de la diversité et de l'acceptation de soi. Aujourd'hui plus que jamais, dans une société moderne à certains égards, mais encore très en retard sur certaines questions. Le Lombard a récemment publié Rebis, d'Irene Marchesini et Carlotta Dicataldo. Une œuvre dont le cadre est médiéval mais qui aborde des thèmes très actuels. La chasse aux sorcières est un thème récurrent dans l'histoire de l'humanité et a pris différentes nuances au fil du temps. Même aujourd'hui, dans notre société, de nombreuses personnes s'engagent dans cette recherche de la personne/sorcière, comprise comme différente de ce qui est considéré comme les canons traditionnellement acceptés en matière de genre, d'orientation sexuelle et au-delà. Le choix de situer l'histoire de Rebis au Moyen-Âge est très fonctionnel car il permet d'aborder ce thème en le combinant avec l'élément historique et le conte de fées, ce qui lui permet peut-être d'atteindre un public plus large. Martino, coupable d'être albinos, se retrouve ainsi entouré du mépris des personnes considérées comme normales, même de certains membres de sa famille. Pour échapper à ce sentiment de solitude, le garçon trouve du réconfort dans l'amour de ses sœurs et en s'occupant de larves d'insectes. Doté d'une grande sensibilité, Martino reconnaît la fragilité de ces créatures et aimerait les protéger et les aider à grandir. Il essaie ainsi de leur donner l'amour et l'affection qui lui sont souvent refusés. Sa vie bascule lorsque, errant dans la forêt, il arrive chez Viviana. Une femme qui l'effraie au premier abord, mais dont il se rend compte qu'elle lui ressemble et qu'elle n'est pas acceptée par la communauté.
Viviana, considérée comme une sorcière, a été brûlée sur le bûcher dans le passé mais a réussi à survivre. Dans la forêt, elle a recommencé à vivre, reconstruisant une communauté d'amies et de femmes qui se respectent et partagent des valeurs et des idéaux. Elle va ainsi faire découvrir à Martino un nouveau monde, qui l'accepte et lui permet d'être qui il est vraiment, sans avoir à se cacher par peur du jugement des autres. De nouveaux personnages entrent en jeu et les figures de Viviana et de Martino s'approfondissent, élargissant ainsi la vision du sujet et poursuivant avec habileté et précision le parcours de croissance du garçon qui l'amènera à devenir une nouvelle personne, sans pour autant renier complètement ses origines. Le garçon devient ainsi membre d'une autre famille élargie, qui n'a pas besoin d'être liée par les liens du sang, mais qui est composée de personnes accueillantes qui le font se sentir chez lui. D'un point de vue artistique, le trait de Carlotta Dicataldo est parfait dans la représentation du paysage médiéval, mais surtout dans les expressions des personnages, capables de transmettre parfaitement leurs émotions. En ce sens, la vue se rétrécit souvent sur les yeux, qui se chargent de larmes ou d'étonnement selon la situation.
VERDICT
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Les deux auteures semblent parfaitement en phase, et avec Rebis elles ont créé une histoire qui touchera un public très large, amenant (nous l'espérons) les lecteurs à réfléchir sur un sujet important et, pourquoi pas, à découvrir leur propre identité et à s'accepter en tant que Martino.