Rodolphe s'est inspiré d'une vieille légende allemande, décrite ensuite par Robert Louis Stevenson, l'auteur de L'île au trésor, dans son livre La bouteille endiablée (1891). Dans la version adaptée, la bouteille a été remplacée par une « main », mais pour le reste, il s'agit d'une merveilleuse adaptation de l'histoire originale. Les dessins de Griffo sont conformes à ce que nous attendons de lui et restituent parfaitement l'atmosphère du XIXe siècle. C'est Stevenson lui-même qui se voit raconter l'histoire dans la bande dessinée par un certain M. Dawson. Au centre de l'histoire se trouve une mystérieuse main d'artiste qui exauce les souhaits de son propriétaire. Mais elle est soumise à des conditions strictes, ce qui nous met face à un beau paradoxe. La main du diable réalise tous vos souhaits, mais vous devez la vendre avant de mourir ou vous serez damné. De plus, vous devez toujours la revendre à un prix inférieur à celui auquel vous l'avez achetée. Dawson achète la main à un pauvre clochard pour toute sa fortune : 49 dollars. Dès lors, tout se passe comme il le souhaite, il obtient tout ce qu'il désire. Une fois prospère et heureux, il décide de revendre la main pour 48 dollars par précaution. Mais le destin frappe : Dawson contracte la lèpre, une maladie alors incurable. Il repart à la recherche de la main qui le guérira. Entre-temps, la main a changé de mains à de nombreuses reprises et son prix est tombé à 1 cent américain. Lorsque la main ne vaut plus qu'un cent, il devient de plus en plus difficile de la revendre. Personne ne veut l'acheter, de peur d'être damné.

Dawson finit tout de même par acheter la main et est guéri de sa lèpre. Mais il est bientôt en proie à de terribles cauchemars, comme si sa damnation était inévitable. Sa femme, Rose, trouve une solution : la main peut être vendue dans une autre monnaie. À ce moment-là, 1 centime de dollar vaut plus que 4 centimes français, et ils peuvent donc vendre la main pour 3 centimes. Mais même à ce prix, personne n'en veut. Celui qui l'achète pour 2 centimes ne trouvera plus d'acheteur disposé à la prendre pour 1 centime. Désespérée, Rose fait appel à un clochard et le convainc d'acheter la main pour 3 centimes, afin de soulager Dawson de son tourment. Elle rachète elle-même la main au clochard. Elle est désormais la nouvelle propriétaire et la situation du couple se détériore à une vitesse fulgurante. Ils sombrent dans la boisson et le désespoir. Dans un pub de l'East End, ils rencontrent le capitaine Bowle, qui est prêt à leur acheter la main. Pour lui, la main artificielle semble idéale, puisqu'il lui manque déjà une main - et qu'il semble de toute façon maudit. Dans l'épilogue, nous voyons Stevenson dans sa maison de Samoa, avec un clin d'œil de Griffo à Paul Gauguin, un contemporain de Stevenson. Stevenson aurait sûrement souhaité vivre quelques années de plus s'il en avait eu la possibilité. Hélas, il est mort d'une hémorragie cérébrale à l'âge de 44 ans.