Scénario et dessin : Nao Iwamoto
Les Noces de l'Or et de l'Eau (Kin no Kuni Mizu no Kuni) est un manga unitaire publié au Japon aux éditions Shogakukan. Il était une fois deux royaumes, l'un riche en or, l'autre riche en eau, qui partageaient une frontière. Les deux nations se battaient sans cesse jusqu'à ce qu'un accord soit trouvé : la plus belle fille du royaume d'or épouserait l'homme le plus intelligent du royaume de l'eau, liant ainsi les deux nations. Cependant, les deux parties ont essayé de revenir sur l'accord en envoyant des animaux à la place ! Sarah, une princesse de bas niveau, est choisie pour épouser l'homme du royaume de l'eau, mais on lui envoie un chiot à la place du marié ! Pendant ce temps, le candidat du royaume de l'eau, Naranbayar, se retrouve avec un chaton ! Lorsque Sarah et Naranbayar se rencontrent, ils décident que, pour arrêter une guerre entre leurs pays, ils feront semblant d'être amoureux. Leur plan fonctionnera-t-il ? Et si de vrais sentiments romantiques naissaient entre eux ?
Quand on lit "Les Noces de l'Or et de l'Eau", on a le sentiment que c'est au lecteur de comprendre le degré de profondeur que peut avoir l'histoire. Nous pouvons l'examiner d'un point de vue, disons, superficiel, sans entrer dans son contexte général. Nous l'entendrons ainsi comme une histoire d'amour correcte dans un décor exotique, comme si elle surgissait des Mille et Une Nuits dans sa forme, dans ses thèmes et même dans ses détails, et avec un couple charmant nous guidant à travers cet univers. Mais si nous voulons approfondir, que ce soit dans une première lecture ou dans une lecture ultérieure, nous avons bien plus. Il y a une bonne analyse politique de la haine irrationnelle entre des pays anonymes divisés par des frontières absurdes, il y a une lutte contre les stéréotypes sociaux et même physiques, il y a une histoire de dépassement des barrières de toutes sortes. Il y a, en somme, beaucoup de détails à chercher et à analyser dans l'œuvre de Nao Iwamoto, et c'est ce qui fait la particularité de ce manga, qui ravit par sa lenteur et son abondance de dialogues, peut-être trop pour les lecteurs habitués à un style plus dynamique. action, mais qui fonctionne ici de manière assez précise, tant dans son histoire que dans son dessin. Iwamoto présente ainsi un manga frais et agréable, qui se lit assez facilement malgré sa longueur. Dans le bon plaisir qu'il garantit, réside peut-être le plus grand handicap que l'on puisse attribuer à Iwamoto. Il y a un moment où les ramifications de l'histoire la compliquent un peu trop, nous emmenant dans des endroits qui peuvent nous éloigner de la simplicité de l'histoire et donnant le sentiment que les choses ne se produisent pas. Autrement dit, il y a des éléments qui ne semblaient pas si nécessaires vu la fin des travaux. Tout s'additionne, oui, car l'auteur est clair sur le chemin à suivre. Les pages supplémentaires, qui peuvent être perceptibles dans l'analyse globale, ne sont pas perçues de cette façon au moment où nous les parcourons car leurs personnages sont bien définis et sont tous importants pour l'histoire. Mais le meilleur est ce qui correspond le mieux au conte de fées. L'idylle, le décor, ce mariage prévu de sceller la paix entre deux pays opposés sans qu'aucun de ses deux protagonistes ne sache vraiment ce qu'ils font. Oui, il est facile de se sentir piégé par ce récit comme si c’était Shéhérazade qui le racontait. Et pour sortir des clichés, les petits détails fonctionnent. Ni elle n'est théoriquement la plus belle princesse d'un royaume, ni il n'est le plus intelligent de l'autre. Des sujets à casser, ce qu'il fait avec une fin délicieusement naïve, une pure fable arabe à savourer et avec de nombreux thèmes de fond. Le dessin d'Iwamoto évolue parmi les eaux hybrides dont il s'abreuve. C'est un manga à bien des égards, dans sa caricature et dans son mouvement, mais il sait être une fable arabe sur bien des points, à commencer par quelques scénarios qu'il travaille méticuleusement et avec beaucoup de détails, atteignant un décor plein et complet. Cette base nous permet de nous sentir très facilement dans l'environnement de conte que Les Noces de l'Or et de l'Eau sait si bien gérer, et le bon endroit pour que les personnages acquièrent le charisme dont ils ont besoin. L'auteur ne brise plus à aucun moment les normes stéréotypées, et il est facile de déduire de l'apparence de quel type de personnage on parle à chaque fois que l'on en voit un nouveau. Iwamoto n’a pas non plus besoin de différents artifices pour que son histoire réalise ce qu’elle se propose de faire avec une sincérité significative. A noter que l'éditeur Akata a également publié une édition collector en grand format, permettant de profiter agréablement d'une meilleure qualité de papier en plus de nous offrir toutes les pages couleur présentes dans la prépublication originale ainsi qu'une galerie d'illustrations et d'esquisses.
VERDICT
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Les Noces de l'Or et de l'Eau a l'énorme vertu d'être fidèle à ce qu'il veut raconter, sans avoir peur des lieux communs ni du nécessaire ajustement du ton social des messages dont a besoin une fable de cette nature. Le résultat est une bande dessinée assez intemporelle, qui sait utiliser les outils fournis par le genre et les déplacer à sa guise pour que l'actualité puisse aussi être personnelle. Un bonne fable.