Gwen de Bonneval, écoanxieux engagé, est très concerné par l’avenir de la planète et de fait celui de son propre fils. Il considère qu’il aurait dû se bouger bien avant, mais à quel âge ? Plutôt que de se juger durement, il décide avec une honnêteté désarmante de replonger de manière non linéaire dans cette matière imprécise : ses souvenirs. Tout d’abord une enfance douloureuse avec une mère violente et lunatique, un père absent et la figure aussi impressionnante qu’écrasante de son grand-père ancien déporté et aide de camp du Général de Gaulle. Il replonge aussi dans sa vie de jeune adulte, puis de père. Il s’interroge sur le monde de demain et ses funestes perspectives écologiques. Nous pourrions croire que nous sommes face à un énième ouvrage autobiographique qui s’interroge sur le passé, la mémoire, les souvenirs, l’avenir et l’écologie.

Il n’en est rien. Gwen de Bonneval creuse, investit et transforme ces sujets dans son récit, certes. Mais ce qu’il cherche, c’est avant tout à comprendre. À se comprendre bien sûr et à faire la paix avec son passé, mais à comprendre aussi ce qu’il peut faire pour un avenir meilleur. À comprendre ce qui nous unit, où se niche l’universel dans l’intime, dans les fêlures, dans les liens. Il nous livre dans la première partie de ce diptyque un ouvrage d’une liberté graphique totale. Il exploite les pleines possibilités de son art pour représenter les différents moments de sa vie, mais la notion de souvenir même. Comment il s’imprime, ce que l’on en retient, comment même on le fabrique en comblant les vides. La scène de la chute impressionnante de son fils dans les escaliers, en plus d’être terrifiante, est une véritable leçon sur la notion de souvenir et sa représentation.