Dans le tome « ??Mille Yeux », le bateau de Thorgal, Jolan et Zorza s'écrase sur les récifs au retour d'une mission dans le grand nord. Les deux jeunes héros restent sur une petite île et le Fils des Étoiles part chercher de l'aide. Cependant, comme d'habitude dans sa vie maudite par les dieux, rien ne peut se passer sans problème... Il se retrouve entre les mains d'un chef local qui lui ordonne de retrouver un trésor de l'époque de l'ancienne guerre entre les dieux et les géants. Thorgal sera-t-il capable d'accomplir la tâche et ensuite de sauver ses proches ?

Nous sommes habitués à ce qu'un nouvel épisode débarque avant Noël. En fait, "Mille yeux" est un volume qui n'est en rien une révolution, Yann continue les meilleures traditions de la série et crée un mélange qui plaît tout simplement. Aegirsson rentre chez lui, ou plus exactement, part à l'aventure et s'attire des ennuis. La bande dessinée démarre sur les chapeaux de roues, avec des explications qui arrivent au fil du temps sous forme de flashbacks, ce qui vous entraîne fermement dans la lecture et vous permet de ne pas vous lasser. Afin de sauver Jolan et (n'ayons pas peur de le dire) sa petite amie Aurora, Thorgal doit accomplir une tâche dangereuse, presque impossible, pour le chef viking local. Brutal, impitoyable et assoiffé de sang. Il y a ici de forts échos d'éléments de volumes tels que Les Archers (un bateau naufragé dans une tempête), ou Louve (un conflit avec un seigneur de guerre impitoyable). Il s'agit également de l'introduction d'un personnage secondaire fort et coloré, chargé d'aider Thorgal et, ce faisant, d'assouvir une vengeance personnelle. Mysla occupe presque la moitié de la couverture, et vous pouvez immédiatement vous attendre à ce que l'intrigue tourne autour d'elle. Notre cœur est momentanément conquis par son dressage... de tétras ! Vous allez adorer cet oiseau ! Le héros, lui aussi, a du caractère, mais c'est ainsi que Van-Hamme l'a présenté dès le départ. Thorgal est un homme tranquille qui pense avant tout à sa famille, et les personnages secondaires sont vivants, pétillants, charismatiques et gagnent le cœur du lecteur.

L'histoire est pimentée par les mythes nordiques, que Yann utilise avec brio. La légende des corbeaux de Midgard, exposée dans l'introduction, attend comme une grenade dégoupillée jusqu'à la toute fin, et l'intrigue tourne autour des yeux titulaires, prisonniers d'une pierre précieuse tombée des étoiles, dont Thorgal doit obtenir au moins un morceau. Les thèmes de la fantasy et de la science-fiction se mélangent également, notamment grâce à Aurora, une jeune fille venue de l'espace. Impossible de ne pas sourire en imaginant ce que ressent Jolan en écoutant la mécanique quantique, les nanoparticules, la napdductivité dont parle l'astrophysicien que le garçon tente de rencontrer. Frédéric Vignaux n'est pas Rosi?ski, Thorgal est un peu moins marqué par la vie, mais la même atmosphère inquiétante dégouline des pages, les cadres sont sombres, les fjords monumentaux, la nature sauvage et les guerriers répugnants. L'accentuation ne manque pas avec des images drastiques, comme celle d'une famille pendue à un arbre. L'atmosphère des légendes est transmise par les ruines de vieux bâtiments, les grottes plongées dans l'obscurité et les huttes mystérieuses construites au milieu de la forêt. Il n'y a tout simplement pas de chaux dans les cadres recadrés par Vignaux. Certes, dès la première page, Thorgal déclare que toutes ces vipères et tous ces squelettes ne sont pas très beaux à voir, mais c'est tout le contraire. Tout est superbe.