"La Rôtisserie de la Reine Pedauque" a été publié pour la première fois en 1892. C'est l'histoire d'un jeune homme à la fin des années 1700, Jacques Menetrier (surnommé Jacques Tournebroche), le fils d'un propriétaire de magasin de cuisine (le magasin s'appelle "La Reine Pédauque"), qui tombe sous l'emprise d'un ecclésiastique quelque peu fripon nommé Jérôme Coignard.  Coignard s'installe quelque temps chez le cuisinier et enseigne au jeune Jacques le latin et d'autres choses.  Au bout d'un certain temps, ils sont engagés conjointement par un noble pointilleux, M. d'Asterac, qui les emploie à traduire des documents anciens.  D'Asterac croit en l'alchimie et, à cette fin, emploie un juif nommé Mosaide, qui prétend être un kabbaliste vieux de 135 ans. D'Asterac ne cesse par ailleurs d'exposer ses théories sur les "salamandres" et les "sylphes", des esprits du feu qui viennent si on les appelle, et qui sont les seuls amants dignes de ce nom. Lorsqu'il demande à Jacques d'appeler une salamandre, la belle nièce de Mosaide apparaît par coïncidence et devient bientôt l'amante de Jacques. Jacques ne tarde pas à avoir des ennuis, car l'objet de sa dévotion, la dentellière Catherine, qui (on le laisse entendre) était auparavant l'amante du père de Jacques, essaie d'attirer Jacques dans une relation, l'entraînant dans une rivalité avec un noble et avec le marchand qui retient Catherine.  L'intrigue est résolue lorsque le marchand fait irruption dans une fête sauvage impliquant le noble, Jacques, Coignard et Catherine.  Au même moment, Mosaide, qui déteste les chrétiens, devient convaincu que Coignard a compromis la vertu de sa nièce (ce que le livre laisse entendre, bien que ce soit Jacques et, plus tard, le noble rival de Jacques qui commettent les actes que Mosaide impute directement à Coignard).  Tous s'enfuient et, par malchance, Catherine se retrouve en route pour le Canada, Coignard meurt et la nièce de Mosaide abandonne Jacques pour le noble qui, après tout, peut lui offrir beaucoup plus en termes de biens matériels.  Jacques devient propriétaire d'une librairie.

Le cœur de l'histoire n'est pas l'intrigue, mais la nature sournoise de la narration et le personnage de Coignard. Tout au long de l'histoire, des indices laissent penser qu'il se passe plus de choses que ce que Jacques sait ou veut bien nous dire.  La philosophie de Coignard est une version plutôt étrange du catholicisme.  L'un de ses principes majeurs est que pour se repentir correctement, il faut pécher correctement, et il semble avoir manqué peu d'occasions dans sa vie de pécher correctement.  Bien qu'apparemment prêtre (bien qu'une fois de plus, le fait que Coignard prenne le titre d'abbé soit peut-être sa propre histoire et non celle de l'Église, c'est difficile à dire), il est un coureur de jupons, un tricheur aux cartes et un voleur. C'est aussi un érudit légitime, toujours intéressé par le savoir et par la recherche d'un bon repas.  Le livre est sournoisement drôle tout au long de l'histoire, également assez excitant, et parfois tout simplement étrange. Et la BD sait très bien l'illustrer.