Les ténèbres qui enveloppent le pays d'Eruin Dulea semblent s'épaissir... Car les pulsions humaines ne semblent pas avoir de limites, surtout lorsque le pouvoir est en jeu. Et il est indéniable qu'Aylissa, la parente de Sioban, fait preuve d'une détermination quasi obsessionnelle à cet égard. Son époux (Sobold du clan Greenwald) et, dans l'épisode précédent, Seamus, apparemment insensible à toute forme d'influence, y compris aux charmes féminins, l'ont bien compris. Pourtant, le titre de cet épisode de « Sudenne » ne laisse planer aucun doute à ce sujet. L'un des derniers chevaliers de la Grâce n'a pas su résister au torrent de passion qui s'est abattu sur la parente Sioban. D'où les spasmes de folie qui s'emparent de Seamus et dont les conséquences le conduisent au fond du donjon du château. Bien entendu, Sioban n'a pas l'intention d'abandonner son ami éprouvé à son sort. D'autant que c'est à lui qu'elle doit le plus, et que c'est en lui qu'elle a trouvé un soutien chaque fois qu'elle en a eu besoin. Cependant, sa tâche n'est pas facile. Limitée par les contraintes de sa position dans la hiérarchie du royaume insulaire, elle doit se montrer particulièrement prudente et sensible. Il en va de même pour Seamus lui-même, qui reste sous le charme d'Aylissa, qui poursuit ses objectifs pas à pas.

Le troisième volet de ce ce cycle n'est pas moins saturé que les précédents d'une tension croissante sur fond de lutte pour le trône d'Eruin Dulea. L'absence d'une confrontation armée à grande échelle, comme dans l'album précédent, est compensée par des scènes un peu plus « subtiles » d'interaction entre les parties en conflit. Conformément à l'esthétique du projet, on retrouve cette fois encore une aura de mysticisme, délicatement dosée, mais pas toujours avec une justification complète des règles de la magie (ce qui était déjà perceptible dans les albums précédents de la série « Les Chevaliers du Pardon », entre autres). L'évolution de certains personnages de cette intrigue est notable, avec un accent particulier sur les personnalités féminines. C'est le signe que l'affrontement décisif de cette étape de la saga est de facto inévitable. Pour des raisons naturelles, cette circonstance suscite l'attente de la suite dite « Sudenne ». Comme c'est souvent le cas dans les titres phares de Jean Dufaux, les concepts de Seamus ne sont pas tous très clairs dans La folie de Seamus. En fait, certains d'entre eux semblent même ridicules. Mais c'est là la « beauté » de ces histoires, que leurs lecteurs semblent avoir acceptée au fil des ans. En toute honnêteté, il faut reconnaître que cette façon de faire de l'artiste n'est pas seulement un exercice auquel il faut s'habituer, mais qu'il s'agit d'une « coloration » unique de sa méthode de création. Ce qui est invariablement agréable, cependant, c'est le travail artistique de Paul Teng, qui est brutal et parfaitement adapté aux réalités d'un monde à l'aube d'un nouveau tournant dans l'histoire du royaume insulaire, qui déterminera son existence future.